Un bref historique des pesticides

Syngenta
Historisches Foto von Farmers mit Pflanzenschutzmittel

La nécessité de protéger les cultures contre les nuisibles et les maladies est aussi ancienne que l’agriculture elle-même. Nous savons, par exemple, que les Sumériens utilisaient déjà le soufre il y a 4500 ans pour éloigner les insectes et les champignons de leurs champs et de leurs réserves. Dans l’Empire romain, on avait recours, entre autres, à des moustiquaires, des silos sur pilotis, des pièges collants sur les arbres ainsi que des extraits de pesticides à base de plantes.  

Les composés toxiques à base d’arsenic et de métaux lourds, également utilisés dès l’Antiquité, étaient beaucoup moins écologiques,et dangereux, pas seulement pour les nuisibles. Ce n’est que depuis quelques décennies que les traitements corrosifs au mercure pour les semences ont été remplacés par des substances actives modernes. 

Un saut au XIXe siècle ouvre la voie à une époque d’avancées majeures dans l’agriculture, mais aussi à certaines des catastrophes parasitaires les plus dévastatrices de l’histoire. L’exemple le plus dramatique est le mildiou de la pomme de terre, qui s’est propagé dans les champs en Irlande et dans de nombreuses autres régions d’Europe dans les années 1840. Les mauvaises récoltes qui en résultèrent ont provoqué une famine qui a coûté la vie à un million de personnes rien qu’en Irlande, entraînant un exode massif vers l’Amérique. Quelques décennies plus tard, l’invasion d’un insecte venu du Nouveau Monde, le phylloxéra, a failli anéantir la production viticole en France et en Suisse. Les champignons parasites, oïdium et mildiou, qui ont également été importés, menacent aujourd’hui encore la viticulture en Europe. 

Rien d’étonnant à ce que ces événements, ainsi que les découvertes scientifiques de cette époque, aient suscité un vif intérêt pour le développement de nouvelles méthodes de lutte contre les nuisibles. Au début du XXe siècle, cinq approches étaient déjà bien établies:  

  • Les moyens biologiques (par exemple, les typhlodromes expédiés par bateau des États-Unis vers la France pour lutter contre le phylloxéra dont il est question plus haut) 

  • Les moyens chimiques (au départ, principalement des produits chimiques inorganiques tels que des composés à base de soufre et de cuivre – de nombreux composés organiques s’y sont ajoutés au cours du siècle)  

  • Des méthodes mécaniques (comme les pièges collants et les bandes de glu sur les arbres fruitiers)  

  • Les mesures d’hygiène (telles que le nettoyage régulier des machines agricoles)  

  • La sélection ciblée des lots de semences, la rotation des cultures, les méthodes de travail du sol, etc. 

Bauern beim Ausbringen von Pestiziden im Piemont in Italien, 1920

Agriculteurs en train d’appliquer des pesticides dans le Piémont en Italie, 1920 

 

Vastes champs d’application, sémantique complexe 

Toutes ces approches sont aujourd’hui encore courantes et importantes. Les possibilités qu’elles offrent sont aussi variées que la terminologie utilisée pour les catégoriser est complexe et parfois déroutante. Au sens classique du terme, les pesticides sont des moyens permettant de lutter contre les animaux nuisibles (en ang.: pests). Ce terme était et est principalement utilisé dans ce sens restreint dans les pays anglophones.  

Selon la conception actuelle, outre les moyens de lutte contre les nuisibles, tous les produits phytosanitaires sont considérés comme des pesticides, y compris par exemple les régulateurs de croissance. Ce point de vue est également partagé par l’OMS et d’autres organisations et autorités, qui définissent les pesticides comme des substances ou des mélanges d’ingrédients à base de substances chimiques ou biologiques destinés à repousser et lutter contre les nuisibles, les maladies et les mauvaises herbes. Les groupes les plus importants sont en l’occurrence les herbicides, les insecticides et les fongicides, mais il existe aussi des applications plus «exotiques» comme les molluscicides, qui agissent spécifiquement contre les limaces. 

Les biocides sont une forme particulière de pesticides. Ils sont également utilisés pour lutter contre les organismes nuisibles, mais sans traiter les plantes vivantes. A titre d’exemple, on citera les détergents et désinfectants utilisés dans les hôpitaux, dans le secteur agroalimentaire ou pour lutter contre les nuisibles pendant le stockage et le transport de produits agricoles. Parfois, un produit est utilisé à la fois dans les champs et en dehors, par exemple ACTELLIC® de Syngenta: développé initialement en tant qu’insecticide pour traiter les parasites des céréales, ce produit est utilisé depuis des années avec succès dans la lutte contre le paludisme. Il est utilisé pour imprégner les murs et les moustiquaires – un traitement qui a déjà sauvé la vie à de nombreuses personnes. 

Spraying Screenshot

Synthétique, identique au naturel ou naturel ? 

L’agriculture conventionnelle et l’agriculture biologique utilisent toutes deux des pesticides pour protéger leurs cultures. Les pesticides synthétiques sont des substances fabriquées par synthèse en laboratoire, cela signifie qu’une structure plus complexe est obtenue à partir de composés et de molécules de structure simple. Des méthodes de recherche modernes permettent d’adapter précisément cette structure à certaines cultures, conditions climatiques ou types de sols. Cela a entraîné une utilisation plus sélective et donc moins importante des pesticides synthétiques au cours des dernières décennies. 

Mais la synthèse en laboratoire permet aussi d’obtenir des produits phytosanitaires identiques au naturel. Les phéromones d’insectes en sont une illustration – ce sont des substances messagères qui servent à la communication entre les individus d’une espèce d’insectes et qui sont utilisées avec succès depuis de nombreuses années dans la lutte contre les nuisibles dans l’agriculture conventionnelle et biologique. Les phéromones synthétisées en laboratoire ont la même structure moléculaire que les composés naturels et sont produites «artificiellement» principalement parce que la demande agricole dépasse de loin la présence à l’état naturel: il ne serait évidemment ni sensé, ni durable, de réduire en bouillie des millions de papillons pour en extraire la substance déclenchant l’attirance.  

Woman working in lab

Les pesticides approuvés pour l’agriculture biologique doivent être d’origine végétale, animale, microbienne ou minérale ou basés sur une substance d’origine naturelle. Outre les phéromones d’insectes déjà mentionnées, le cuivre, le soufre, les extraits de plantes et les cultures bactériennes ayant un effet insecticide en font notamment également partie. Le terme «non synthétique» ne s’applique pas tout à fait à ces pesticides, car outre les phéromones, les sels de cuivre et d’autres substances ne proviennent pas directement de la nature, mais sont produits synthétiquement. 

Peu importe que cette catégorisation des pesticides soit ou non judicieuse, car de nouvelles approches telles que la gestion intégrée des parasites (IPM) permettent d’utiliser au mieux les possibilités disponibles pour traiter les problèmes des nuisibles de manière efficace et sûre. Elles associent l’utilisation de produits non synthétiques et synthétiques modernes et des méthodes de culture durables telles que la rotation des cultures et le travail non agressif des sols, ce qui signifie globalement une réduction de l’utilisation de pesticides. Cela contribue à une agriculture respectueuse des ressources, productive et attrayante pour les agriculteurs et les consommateurs.