Virus de la jaunisse du navet (TuYV) : situation pour le colza suisse
Ces dernières années, le Virus de la jaunisse du navet (TuYV) est devenu un sujet de préoccupation croissant
dans la culture du colza. Ayant fait l’objet d’un suivi, sa diffusion effective a désormais été analysée. Le taux de contamination est jugé moyen, avec des différences régionales. Lors du choix variétal, il est donc recommandé d’opter pour une variété résistante ou tolérante. Les rapports de rendement des champs testés ont montré que la variété SY Matteo donnait partout des rendements élevés à très élevés, même en cas d'attaque moyenne à forte du virus de la jaunisse du navet.
Qu’est-ce que le TuYV et comment le reconnaît-on ?
« TuYV » est l’acronyme pour la désignation anglaise « Turnip yellows luteovirus ». En français, on parle de Virus de la jaunisse du navet, alors qu’en allemand, il s’agit de la jaunisse du navet ou du rutabaga, plantes sur lesquelles les premiers symptômes ont été décrits dans les années 1950. Plusieurs espèces de puceron infectent le colza, en particulier le puceron vert du pêcher. La contamination se produit déjà en automne, notamment en cas de températures élevées. Des feuilles rouge foncé en automne ou rouge vif après la floraison peuvent indiquer une atteinte. Durant la phase de croissance en longueur, il n’y a souvent pas de symptômes visibles. Cependant, la coloration des feuilles peut aussi être une indication de facteurs abiotiques (eau stagnante, froid, carence nutritionnelle, etc.), si bien qu’un diagnostic définitif ne peut être établi qu’au laboratoire. D’après la littérature spécialisée, un peuplement touché peut souffrir d’une baisse de rendement de 12 % à 34 %. Tant la quantité d’huile que le rendement en huile sont dégradés, alors que la teneur en glucosinolate, substance indésirable, augmente.
Symptômes du TuYV en automne : ils se confondent facilement avec une carence en phosphore ou un autre stress environnemental ; seule une analyse
en laboratoire permet de poser un diagnostic sans équivoque.
Occurrence en Europe et en Suisse
La propagation du TuYV a surtout fait l’objet d’une surveillance à l’étranger, dans le cadre de suivis annuels de diverses entreprises
de sélection. Ceux-ci ont permis de constater des différences régionales. Le suivi effectué par Syngenta en 2021 a permis d’établir ce qui suit : fortes contaminations (> 70 % d’échantillons contaminés) en Allemagne, Pologne, Tchéquie, Danemark et Roumanie ; contamination moyenne (de 30 % à 69 %). En 2022, la contamination était modérée en Allemagne et en Hongrie. En Suisse, un suivi a été réalisé pour la première fois en 2023, notamment parce que les services de vulgarisation avaient des doutes quant à la présence et la diffusion du TuYV. Des feuilles de colza ont donc été collectées sur l’ensemble du Plateau, de Genève à la Thurgovie ; elles ont été analysées par le laboratoire de Syngenta au moyen du test ELISA. La carte de l’illustration montre que si le TuYV a été détecté sur de nombreux sites, certains champs en sont totalement exempts. Considérant l’ensemble des analyses, cette année, le niveau de contamination est considéré comme faible à moyen.
Au total, 15 échantillons issus de 12 sites ont été prélevés et testés, principalement issus de la variété tolérante SY Matteo, mais aussi de variétés résistantes, comme Tempo.
Lutte et choix variétal
La lutte est dirigée contre le vecteur de la maladie, à savoir le puceron. Depuis l’interdiction des néonicotinoïdes dans l’enrobage des semences, les plantes ne sont plus protégées contre les pucerons durant les premiers stades de leur croissance. La lutte préventive passe donc prioritairement par le choix de la bonne variété. Les colzas
peuvent se subdiviser en variétés résistantes, tolérantes et sensibles. Dans les variétés résistantes, la plante empêche en principe l’infection par le vecteur, pouvant réduire sa multiplication. Dans les variétés tolérantes, la plante est en revanche infectée, mais il n’en résulte pas de dommages importants. Quant aux variétés sensibles, elles sont par contre massivement infectées et subissent des dommages qui réduisent le volume de la récolte. S’agissant du TuYV, la limite entre résistance et tolérance est difficile à définir. Actuellement, un gène de résistance connu est introduit par croisement dans certaines variétés. Si ce gène est présent dans une variété, celle-ci est considérée comme résistante et mentionnée comme telle dans la liste variétale de swiss granum. Les variétés tolérantes n’obtiennent en revanche pas cette « distinction ». La variété SY Matteo en est un exemple. Des recherches en laboratoire effectuées en Allemagne ont montré qu’en cas d’attaque du virus, SY Matteo affiche, à l’instar des variétés résistantes, une charge virale nettement inférieure à celle des variétés sensibles. Les essais en plein champ ont confirmé ce résultat : comme les variétés résistantes, SY Matteo n’a pas subi de baisse de rendement suite à une contamination, au contraire des variétés sensibles. Cela prouve qu’il existe d’autres gènes de résistance, qui n’ont pas encore été découverts mais se trouvent dans les variétés tolérantes. Ce qui est généralement valable, c’est que le TuYV contamine les plantes résistantes ou tolérantes, mais que son développement et son transport dans la plante sont retardés. Considérant les résultats du suivi suisse, il est donc recommandé de choisir une variété résistante ou tolérante. Le sélectionneur peut indiquer si une variété est tolérante, pour autant que des comparaisons aient été effectuées au laboratoire et au champ.
SY Matteo confirme sa tolérance
Dans les champs étudiés, les rendements ont également été communiqués par les agriculteurs. Ceux-ci étaient partout élevés à très élevés pour la variété SY Matteo. Dans le champ fortement contaminé de Brittnau, 47 dt/ha ont pu être récoltés. Ainsi, SY Matteo confirme également en Suisse les connaissances acquises en Allemagne, à savoir que la variété présente une tolérance au virus TuY et qu'en cas d'attaque, il n'y a guère lieu de craindre une baisse notable des rendements.